Repowering: vers une évolution timide des règles juridiques

19/01/2022

A l'heure où les premiers parcs éoliens, installés dans les années 1990 et 2000 et disposant d'une puissance unitaire inférieure à 1 MW, arrivent en fin de vie, il est nécessaire de se préoccuper de la rénovation et la modernisation des parcs. Ainsi, le renouvellement (traduction en francais du mot « Repowering ») et la prolongation de la durée de vie des parcs, avec notamment l'amélioration du rendement des sites, devraient intervenir rapidement, dans la mesure où ils répondraient à des enjeux climatiques et économiques importants.

L'arrêté du 26 août 2011 modifié définit le renouvellement comme « un remplacement d'un ou plusieurs aérogénérateurs constituant une modification notable au sens de l'article R.181-46 du code de l'environnement ». Autrement dit, le repowering correspond aux opérations qui consistent à démanteler partiellement ou totalement un parc existant, afin d'installer de nouvelles éoliennes plus performantes et puissantes produisant ainsi davantage d'électricité[1]. Le repowering des installations existantes permet d'optimiser l'exploitation du site.

Différentes options s'offrent à l'exploitant, tels que la mise en place d'un programme de modernisation technique permettant de prolonger la vie d'un parc éolien existant, la reconstruction totale d'un site avec divers modèles de turbines généralement plus puissantes et performantes ou dans une configuration autre et/ou un système de connexion moderne et à jour.

Pour mémoire, l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux éoliennes soumises à autorisation[2], tel qu'avant l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 décembre 2021, prévoyait différentes obligations pour le porteur de projet.

En premier lieu, l'obligation de démantèlement concerne :

  • les éoliennes et les postes de livraison ;
  • les câbles dans un rayon de 10m autour des éoliennes ;
  • l'excavation des fondations jusqu'à la base de leur semelle ;
  • la remise en état du site avec le décaissement des aires de grutage et des chemins d'accès sur une profondeur de 40cm.

En deuxième lieu, l'arrêté impose une obligation de recyclage des éoliennes. Les déchets de démolition et de démantèlement sont réutilisés, recyclés, valorisés ou à défaut éliminés :

  • au 1er juillet 2022 : 90% de la masse totale des aérogénérateurs sont excavés (y compris les fondations) ;
  • au 1er juillet 2022 : 35% de la masse des rotors doivent être réutilisés ou recyclés.

En troisième lieu, l'arrêté prévoyait une obligation de composition à partir de matières réutilisées ou recyclées. Ainsi, les aérogénérateurs mis en service :

  • au 1er janvier 2024 devront comporter 95% de matières recyclées pour leur masse totale (y compris les fondations) ;
  • au 1er janvier 2023 devront comporter 45% de matières recyclées pour la masse de leur rotor ;
  • au 1er janvier 2025 devront comporter 55% de matières recyclées pour la masse de leur rotor.

Dans la continuité des engagements en faveur des énergies renouvelables affirmés par l'Union européenne depuis la directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001 et des objectifs climatiques fixés pour la France, dix mesures destinées à favoriser les « conditions d'acceptabilité et de maîtrise suffisantes » des projets éoliens ont été présentées par la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, le 5 octobre 2021[3].

A la suite de cette déclaration, deux projets d'arrêtés ministériels, portant modification de la réglementation relative aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumises à autorisation et déclaration, ont fait l'objet d'une consultation publique du 20 octobre au 9 novembre 2021. Ils portent notamment une attention particulière au démantèlement et au recyclage des éoliennes.

Par un arrêté du 10 décembre 2021, relatif aux éoliennes soumises à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement[4], publié le 19 décembre 2021, le ministère de la Transition écologique a voulu modifier les dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 relatives aux repowering entrant en vigueur le 1er janvier 2022.

Cet arrêté a notamment pour objet de clarifier les prescriptions applicables en fonction de la date du renouvellement et introduit des évolutions en cas de renouvellement.

L'arrêté du 10 décembre 2021, entré en vigueur le 6 janvier 2022, apporte de nouveaux éléments.

L'arrêté apporte tout d'abord des précisions relatives à la définition des « installations existantes ». En ce sens, les installations nouvelles constituent « les installations dont le dépôt du dossier complet de demande d'autorisation environnementale, y compris en cas de modification substantielle, est postérieur au 1er janvier 2022. Les autres installations sont dénommées installations existantes. Les installations ayant fait l'objet d'une mise en service industrielle avant le 13 juillet 2011, celles ayant obtenu un permis de construire avant cette même date ainsi que celles pour lesquelles l'arrêté d'ouverture d'enquête publique a été pris avant cette même date, sont dénommées « installations existantes historiques » (article 1 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié).

Par ailleurs, pour les installations soumises à autorisation, le texte précise qu'en cas de renouvellement d'éoliennes, si la distance d'éloignement de 500 mètres par rapport aux habitations n'est pas respectée au moment du dépôt du porter-à-connaissance (ce qui est notamment possible pour les parcs anciens), elle ne peut en aucun cas être réduite (article 3 III de l'arrêté du 26 août 2011 modifié).

L'arrêté prévoit en outre qu'un projet faisant l'objet d'un renouvellement, autre qu'un renouvellement à l'identique, doit vérifier du respect de l'une ou les critères de réalisation de l'étude d'impact cumulés ou « n'aggrave pas la situation des radars météorologiques vis-à-vis du ou des critères qui ne sont pas respectés dans la situation préexistante ». « Les éléments portés à la connaissance du préfet contiennent une étude comparant les impacts avant et après modification » (cf. article 4 V).

Le texte introduit ensuite la possibilité de réutiliser les câbles autour des éoliennes et les postes de livraison pour de nouveaux aérogénérateurs (article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié).

De plus, « les fondations en place peuvent ne pas être excavées si elles sont réutilisées » pour fixer les nouvelles éoliennes (article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié).

Enfin,en cas de renouvellement de toute ou partie de l'installation, l'arrêté apporte des précisions sur la réactualisation du montant initial de la garantie financière « par un nouveau calcul en fonction de la puissance des nouveaux aérogénérateurs » avant la mise en service du parc (cf. Annexe I). À compter du 1er janvier 2022, les garanties financières sont réévaluées au regard de la formule de l'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 modifié par l'arrêté du 10 décembre 2021.

En conclusion, si cette réforme permet, d'une part, d'éclaircir les dispositions relatives au repowering et, d'autre part, de contribuer à l'évolution des règles juridiques, il n'en demeure pas moins qu'elle demeure timide dans la mesure elle ne crée pas un régime spécifique relatif au renouvellement des parcs éoliens qui s'inscrit toujours dans le droit commun de la modification d'une installation classée (article L.181-14 du code de l'environnement).

References


[1] Instruction du Gouvernement du 11 juillet 2018 relative à l'appréciation des projets de renouvellement des parcs éoliens terrestres (URL : Instruction du Gouvernement du 11 juillet 2018 relative à l'appréciation des projets de renouvellement des parcs éoliens terrestres. - Légifrance (legifrance.gouv.fr))

[2] Arrêté du 26 août 2011 relatif aux éoliennes soumises à autorisation (NOR : DEVP1119348A),

[3] Déclaration de Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique du 5 octobre 221 (lien).

[4] Arrêté du 10 décembre 2021 modifiant l'arrêté du 26 août 2011 modifié relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement - Légifrance (legifrance.gouv.fr).